17.01.2018
Communiqué de Paysages de France
Association agréée dans le cadre national
paysagesdefrance.org
Contact Paysages de France : 06 82 76 55 84
La commission d’enquête a rendu son rapport sur le projet de règlement local de publicité intercommunal de Dijon Métropole.
La complaisance, les insuffisances et le parti pris dont fait preuve trop souvent ladite commission dans son rapport, au demeurant émaillé de nombreuses réserves, font que les propositions exprimées dans le cadre de l’enquête publique par les associations nationales agréées restent plus que jamais d’actualité.
Dijon Métropole élabore un règlement de publicité mais le maire de Dijon ne répond même pas lorsqu’il est saisi de cas d’infractions (demande de Paysages de France du 16 mars 2015). Du fait de sa carence, des panneaux installés en violation du code de l’environnement sont toujours en place 1037 jours après la demande de l’association (voir les 3 photos ci-dessus)
Parti pris
À maintes reprises, la commission d’enquête se prévaut implicitement de son objectivité et de sa neutralité. Pourtant, les exemples de son parti pris, de son manque de considération à l’égard des opinions exprimées par les associations, et même de sa désinvolture quant au sort réservé aux populations[1] ne manquent pas.
C’est ainsi par exemple que, concernant l’omniprésence de la publicité sur mobilier urbain telle que prévue par le projet, au besoin à force de dérogations, elle se borne à trouver « regrettable » que dans le rapport de présentation le nombre et la localisation de ces dispositifs « n’aient pas été portés à la connaissance de la commission d’enquête et du public.[2] »
De même, alors que les effets calamiteux de la publicité numérique ont été largement dénoncés dans le cadre de l’enquête publique, tant par les particuliers que par les associations nationales agréées, la commission conclut d’une façon suffisamment édifiante pour qu’il soit inutile d’y ajouter le moindre commentaire :
« les nouvelles technologies, évoquées par le maître d’ouvrage, vont sans aucun doute participer à préserver davantage l’environnement » (page 53)
La subjectivité et le parti pris dont peut faire preuve la commission d’enquête la conduit ainsi à cautionner sans discuter le charabia idéologique en vertu duquel la zone 4, qui regroupe de très vastes espaces à dominante commerciale, a forcément vocation à illustrer « la France moche », à supporter toutes les catégories de publicités, y compris les plus agressives et selon les formats les plus grands, cela lors même que l’enjeu devrait être au contraire de dépolluer ces espaces, de les réhabiliter, de les végétaliser :
« le RLPi doit être l’outil d’une préservation de sites à forte valeur patrimoniale et des paysages urbains habités au quotidien, mais cette préservation doit être contextualisée et modulée selon l’intérêt des lieux »
Même lorsque la préfète en personne[3] demande des mesures de clarification sur un point particulièrement sensible puisqu’il concerne les publicités géantes, (bâches publicitaires sans limites de surface…), la commission se borne à noter :
« Pour ce qui concerne l'observation formulée par Madame la préfète de la Côte d'Or sur les bâches comportant de la publicité, Dijon Métropole n'a apporté aucune réponse. » (Page 55)
« Regrets »
Pourtant, cette même commission ne peut s’empêcher par moments d’évoquer l’extrême laxisme de telle ou telle mesure du projet.
Il en est ainsi de la hauteur tout à fait excessive des enseignes sur toiture, point sur lequel elle rejoint sur le fond la position des associations nationales agréées, mais en se bornant à émettre un simple « regret »…
Les enseignes trop hautes lui feraient donc verser des larmes, mais pas les mesures exorbitantes prévues pour la publicité sur les trottoirs ? Étrange, vu les interrogations sur le possible conflit d’intérêts pointé du doigt par les associations nationales agréées.
Illégalités
Il est très grave que la commission, plutôt que d’enquêter sur la légalité de telle mesure envisagée par le projet et signalée comme gravement entachée d’illégalité[4] par les associations nationales agréées, se débarrasse du problème en se bornant à répondre qu’elle « n'a pas pour mission de procéder à une analyse juridique des différents arguments contradictoires présentés. »
Pour autant, cette même commission préconise, sans avoir donc procédé aux vérifications nécessaires, une mesure dont elle aurait dû et pu vérifier qu’elle était illégale, et, c’est le comble, tout en laissant croire qu’une telle demande émanerait des associations :
« Enfin, pour faire suite à la demande présentée dans la contribution commune des trois associations de défense de l'environnement, la commission considère que les dispositions actuelles du RLPi concernant le mobilier urbain pourraient utilement être amendées de manière à respecter totalement l'article R581-42 du code de l'environnement, à savoir, introduire la notion d'interdiction de la publicité numérique sur le mobilier urbain dans les communes de moins de 10 000 habitants ne faisant pas partie de l'unité urbaine de Dijon".
Il est tout aussi grave que la commission d’enquête, pourtant explicitement alertée par l’association Paysages de France sur un point particulièrement trouble[5], se borne à écrire :
« les associations de protection de l'environnement agréées comme « Paysages de France » sont consultées "à leur demande". Cette association n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'elle a effectivement manifesté son intention d'être consultée sur ce projet. Dans l’état actuel des informations détenues par la commission d’enquête il ne semble pas que la procédure soit entachée d’illégalité » (page 70)
Une telle position est d’autant plus indéfendable que cette commission, qui a auditionné très longuement et à maintes reprises le responsable du projet – dont les propos, parfois acrimonieux et désobligeants à l’égard des associations sont exposés à longueur de pages d’un rapport qui en compte près de 200 (!) – n’aura donc pas trouvé ne serait-ce que 5 minutes pour demander des précisions à Paysages de France !
La commission en agissant de la sorte ne pouvait mieux faire pour se discréditer.
Conflit d’intérêts
De la même manière, la commission évacue d’un revers de la main la question du possible conflit d’intérêts dont le conseil de la mairie (cabinet Cadre & Cité) est légitimement soupçonné. Elle se borne en effet à prendre acte des propos tenus par le responsable du projet, lequel, plutôt que d’aborder le problème de fond, se permet d’accuser l’association Paysages de France d’introduire « un élément de suspicion à la seule fin de discréditer un projet de RLPi » !
Plus blanc que blanc !
En revanche, cette même commission, qui n’a donc pas cru nécessaire de vérifier si oui ou non la procédure était entachée d’illégalité ainsi que Paysages de France en détient la preuve (voir supra), trouve le temps d’enquêter longuement sur la nature des produits susceptibles d’être utilisés pour l’entretien des dispositifs publicitaires et sur la différence entre les différents produits, selon qu’ils bénéficient ou pas d’une certification officielle, de niveau national ou même européen…
Bref, difficile dans ces conditions d’accorder la moindre fiabilité à ce rapport et difficile donc de ne pas rappeler que le constat dressé par les associations dans le cadre de l’enquête publique et dans le communiqué de presse de novembre 2017 demeure pour l’essentiel d’une actualité toujours aussi brûlante.
[1] Du fait de l’autorisation sans frein, partout sur les trottoirs et jusque dans les secteurs protégés, de milliers de panneaux publicitaires, le plus souvent du format maximum possible, du nombre maximum possible et selon les technologies les plus agressives disponibles (publicités numériques).
[2] Concernant la publicité sur mobilier urbain et donc la publicité sur les trottoirs, le cabinet Cadre & Cité (qui a aussi pour activité la passation de contrats de mobilier urbain…) n’avait pas hésité à écrire dans son « Rapport de présentation » : « Le nombre et leur localisation étant parfaitement connus, leur recensement est inutile ».
[3] Les associations nationales agréées ont alerté la commission sur l’aspect souvent opaque, ambigu ou incompréhensible de ce projet. Au point que, à moins d’être un spécialiste aguerri du domaine, autrement dit afficheur, il est quasiment impossible de s’y retrouver. La commission admet que « Toutefois, des imprécisions ou des dispositions mal formulées peuvent conduire à une interprétation erronée du règlement. » (Page 111)
[4] Ni plus ni moins que l’autorisation de la publicité sur mobilier urbain dans 9 communes où elle ne peut être autorisée…
[5] Absence de consultation de Paysages de France, en violation de l’article L. 132-12 du code de l’urbanisme, avant l’enquête publique.